La servuction
Définition de : « Servuction - Servuction system » d’après le mercator
Organisation des moyens matériels et humains nécessaires à la prestation de service. Elle distingue les interactions entre clients, entre les clients et le front-office (personnel en contact, environnement matériel), entre personnel en contact et environnement matériel, et entre front-office et back-office (organisation interne de soutien).
La fabrication d’un service: la servuction.
Les étapes et le contenu du processus de fabrication d’un produit, fournissent une trame pour la compréhension et l’analyse de la création et de la fabrication du service.
Pour fabriquer un service de façon industrielle, c’est à dire en grand nombre, mêmes étapes que pour un produit-objet, conception d’abord, puis réalisation. Un exemple simple servira d’illustration, le transport collectif urbain par autobus.
1. Conception du service.
Comme pour les produits-objets, avant de fabriquer un service, il faut le concevoir, c’est à dire le calibrer, en définir les caractéristiques, ainsi que les moyens de l’obtenir. Pour le transport collectif, il faut définir le tracé de la ligne, les arrêts, les horaires de passages des autobus, et la vitesse; ces différents éléments permettent de définir avec précision le service, que l’on peut décrire ainsi: transporter une personne d’un arrêt A un arrêt B, dans certaines conditions d’attente, de confort et de vitesse. A l’instar de la conception d’un produit-objet, il est de plus nécessaire dans cette phase, de concevoir aussi le mode de réalisation du service, en d’autres termes de concevoir la fabrique et ses modalités de fonctionnement.
2. Fabrication du service.
La fabrication ou la réalisation du service se fait de la manière toute simple que tout le monde connaît:
le passager/client, attend l’autobus à un arrêt; il y monte lorsqu’il arrive, et s’installe à bord; le conducteur démarre, conduit sa machine, et s’arrête à l’arrêt de destination, où le passager descend.
On identifie aisément les trois éléments nécessaires à la fabrication du service: la main d’œuvre, c’est le conducteur, et la machine, l’autobus; de façon générique, on appellera ces deux éléments le personnel en contact et le support physique. Si ces deux premiers éléments sont strictement de même nature que ceux de la fabrication du produit, le troisième, par contre, est absolument différent: au lieu des matières premières, on trouve le client-passager.
On appelle ce processus de fabrication du service, servuction, néologisme qui est au service ce que la production est au produit-objet.
Outre les éléments constitutifs de la servuction, les interactions entre ces éléments, dont la nature et le contenu sont cruciaux pour que le service soit correct.
3. Une différence fondamentale: la place du client.
Chaque client est impliqué dans sa propre servuction, et obtient son propre service.
Le rôle joué par le client est absent de la fabrication des produits. Les usines ne sont pas ouvertes au public, et lorsque le consommateur achète un produit, il ne sait en général même pas où il a été fabriqué. A l’inverse, le client est présent dans la servuction, il est partie prenante du processus, il participe à la fabrication du service.
La présence et le rôle du client dans la servuction constitue la singularité fondamentale du système, par les conséquences multiples que cela implique en marketing : le client est à la fois producteur et consommateur; ceci veut dire que le directeur de l’unité de service, doit considérer le client sous ce double aspect, et se trouve responsable du comportement adéquat du client; ce dernier doit être en mesure de tenir efficacement ce double rôle.
Le fait qu’il y ait plusieurs clients à la fois dans le même système signifie que des relations vont se développer entre eux, et donc, chacun des services va être influencé par la présence des autres clients; c’est de la responsabilité du concepteur, du gestionnaire, c’est à dire du directeur de l’unité, d’organiser ces relations pour faire en sorte qu’elles aient des conséquences positives ou neutres sur le service de chacun des clients, mais évidemment pas négative
4. Fonctionnement du système.
Comme dans tout système, dans le système de servuction on trouve les éléments, le support physique, le personnel en contact et le client, chacun d’entre eux est relié à tous les autres et de façon réciproque. Ce système fonctionne vers un résultat qui est le service, et qui devient à son tour un élément du système. Enfin ce système obéit à la règle dite d’équilibre : si aucun élément ne varie, le résultat est toujours le même; si l’on modifie l’un des éléments, par le jeu des interactions le système va se trouver en déséquilibre, avec un résultat qu’il est difficile de prévoir exactement, puis petit à petit, le système va retrouver son équilibre , avec un résultat différent de ce qu’il était avant la modification de l’élément.
Dans le système de servuction cette propriété doit être très sérieusement prise en compte par le directeur de l’unité; on peut l’exprimer ainsi: tout changement ou modification d’un des éléments du système de servuction, entraîne un changement non direct du résultat. Un exemple illustrera ce point: au milieu des années 80, une des plus grandes banques françaises, développant de nouvelles agences, décida de faire asseoir ses clients devant un bureau les séparant du personnel, lui-même assis, au lieu de les servir debout devant un guichet; cette innovation avait pour but d’améliorer le confort des clients et du personnel, de rendre la relation plus conviviale, et bien sûr, de permettre ainsi une meilleure vente de “ produits ” bancaires. Le résultat fut inverse, les transactions durèrent plus longtemps, et la qualité du service, notamment pour les transactions de routine et les clients pressés s’abaissa, sans parler des files d’attente qui s’allongèrent; assez rapidement la plupart des clients refusèrent de s’asseoir, le siège signifiant pour eux durée, les relations avec le personnel s’en trouvèrent détériorées, et on aboutit à l’inverse du résultat attendu. La banque dut revenir rapidement à un type d’agence plus traditionnel.
On voit bien dans cet exemple comment une modification de l’agencement du support physique et des instruments mis à la disposition des clients et du personnel, modifications qui poursuivent un objectif tout à fait justifiable, par le jeu des relations réciproques, aboutissent à des comportements et des perceptions qui entraînent un résultat en termes de niveau de service opposé à celui recherché.
Le fonctionnement de la servuction doit donc s’appréhender de façon globale, en tenant compte des effets de chaque élément dans ses relations avec les autres; c’est la grande difficulté, mais aussi la grande force de l’approche système. Cette approche système requiert ainsi chaque fois que l’on modifie un élément de simuler le fonctionnement pour en voir le résultat probable; ceci est d’autant plus important que par rapport à l’évolution de l’environnement, l’entreprise de service va rechercher l’amélioration du système par une succession de micro décisions opérationnelles.